L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a décidé, mercredi 14 octobre, de classer au niveau 2 sur 7 de l'échelle INES un incident survenu en juin sur un site du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à Cadarache (Bouches-du-Rhône). L’organe de surveillance a également ordonné l'arrêt des travaux sur cette installation en cours de démantèlement. Le CEA a indiqué avoir signalé à l'ASN un incident constaté lors d'opérations d'assainissement de son atelier de technologie du plutonium (ATPu), à l'arrêt depuis 2003.
Dans un communiqué en date du vendredi 16 octobre, l’ASN explique que les dépôts retrouvés sont « évalués à environ 8 kg pendant la période d'exploitation de l'installation", étaient en fait "de l'ordre de 22 kg, et le CEA estime que la quantité totale pourrait s'élever à près de 39 kg". "L'ASN (...) a suspendu les opérations de démantèlement dans l'installation et a soumis leur reprise à son accord préalable", précise le communiqué qui insiste sur le décalage entre le signalement de l'incident par le CEA le 6 octobre et la connaissance du problème, en juin.
"Ce délai est tout à fait inacceptable", a commenté Laurent Kueny, chef de la division de Marseille de l'ASN, qui souligne par ailleurs un "problème de méconnaissance partielle" des données concernant les quantités de matière présente. Le CEA a expliqué avoir déclaré l'incident en octobre, préférant "attendre d'avoir une vision globale des stocks" de matière. Les responsables du site de Cadarache, qui fête vendredi ses 50 ans, assurent n'avoir pas pris de risque inconsidéré lors du démantèlement de l'Atelier de technologie du plutonium (ATPu), où les dépôts de poussières radioactives résiduelles à l'issue de l'exploitation se seraient progressivement accumulées dans des recoins totalement inaccessibles, à l'intérieur des 450 "boîtes à gants" ou compartiments étanches servant à manipuler le combustible. Quant au risque d'accident, "c'est évident qu'on était loin des limites" ajoute le directeur du CEA à Cadarache, Serge Durand.
Les membres du gouvernement en charge de l’écologie ont réagit vivement. L'incident sur le site de Cadarache est "scandaleux" et il est "inadmissible", a jugé jeudi, sur RTL, la secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, Chantal Jouanno. "Il est totalement anormal que sur cette filière que l'on dit extrêmement contrôlée, on découvre que la comptabilité est mal tenue, qu'on ne sait pas exactement combien il y a [de plutonium] et surtout qu'on en soit informé si tardivement" ajoutant que "l’on va voir qui est responsable de quoi et ça permettra de savoir s'il faut que des têtes tombent".
L’Atelier de Technologie du Plutonium (ATPu) est « à l'arrêt définitif et en cours de démantèlement depuis début 2009 », selon le ministre. Son arrêt avait été ordonné « car le niveau de sûreté ne correspondait plus aux exigences attendues aujourd’hui », précise Jean-Louis Borloo. « Elles ne pourront reprendre qu’après autorisation de l’ASN, lorsque toutes les garanties de sûreté pour les opérations de démantèlement auront été prises », affirme le ministre de l’Ecologie, qui « regrette profondément qu’un tel délai se soit écoulé entre la découverte de cette situation et sa déclaration ».
Les écologistes argumentent sur la dangerosité de cette incident. Selon le réseau « Sortir du nucléaire », « c'est l'équivalent de six bombes atomiques qui est illégalement stocké à Cadarache ».Pour Greenpeace France, « il s'agit d'une des situations les plus graves et les plus critiques que l'on ait pu rencontrer dans une installation nucléaire depuis longtemps ».
Peu importe de la réalité de la gravité de cette « découverte » il est certain que cet épisode mine d’avantage encore la réputation de la filière nucléaire française.
Article FM 3B Conseils
Sources : L'express / Le Monde / Libération / 3B Conseils