PEKIN (Chine) 16 juillet 2010 – 3B Conseils – Le navire scientifique (et brise-glace) chinois Xuelong "Dragon des neiges" - un ancien cargo ukrainien - met le cap sur l'Arctique, une région lointaine où la Chine ne possède aucun territoire et donc pas le plus petit droit territorial, mais qu’elle regarde avec un intérêt croissant alors que ses glaces fondent. La région pourrait être dépourvue de glace l'été en 2050-2060, voire plus tôt, selon les études.
En effet, le retrait de la banquise, dû au réchauffement climatique, devrait libérer des voies de navigation durant l’été et donner accès à des ressources naturelles. Côté ressources, l'Arctique est riche de promesses avec, en eaux profondes, difficiles à exploiter, parfois près des côtes : jusqu'à 13% du pétrole et 30% du gaz naturel mondiaux non découverts, selon l'Institut de géophysique américain USGS.
La question est sensible, les convoitises âpres et l’approche des pays limitrophes (Russie, Norvège, Etats-Unis, Canada et Danemark) divergente (voir article du blog du 30/03/2010 « L’Arctique : coopération et rivalités »). On rappellera à cet égard que l’approche sur le statut juridique des eaux de l’Arctique peut être un point d’achoppement puisque les États-Unis et l’Europe dont la Norvège considèrent qu’il s’agit de détroits maritimes alors que la Russie et le Canada appréhendent la question sous l’aspect d’eaux intérieures. Il reste encore beaucoup de points à discuter pour que le Droit de la mer s’y applique comme pour l’ensemble des mers et océans du globe.
Nous avons ainsi évoqué dans notre article du blog du 28 juin 2010 sur « les capacités militaires françaises en zone arctique et antarctique », les inquiétudes du député François Cornut-Gentille sur les moyens dont disposent l’armée française dans les deux zones polaires - sources d’enjeux géostratégiques majeurs en raison du changement climatique -.
Au détour de cette question au gouvernement, apparaissait également en filigrane l’action de la République populaire de Chine qui projette de lancer en 2013 un brise glace, bien que n’ayant aucun territoire concerné par ce type de climat.
L’ouverture de nouvelles voies maritimes intéresse tous les Etats et à titre d’exemple « ce passage raccourcirait de 6.400 kilomètres la route Shanghai-Hambourg, par rapport au trajet via le détroit de Malacca et le Canal de Suez, et éviterait les pirates du Golfe d'Aden qui font exploser les coûts d'assurance », selon le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri), avec néanmoins de possibles écueils : la navigation entre les icebergs et les prétentions en matière de droits de passage des riverains.
S’agissant de la Chine, « elle est dans une position très désavantagée dans cette compétition larvée autour du passage arctique et de ses ressources », souligne l’IHS Global Insight.
Toujours selon l’IHS, "les enjeux pour la Chine sont importants" dans le domaine logistique, pour l'accès à ses grands partenaires commerciaux que sont l'Amérique du Nord et l'Europe, et au plan des ressources car « on connaît l'appétit de la Chine pour de tels actifs à l'étranger (…). Devenue puissance mondiale, la Chine a davantage son mot à dire dans les affaires internationales et sera sans doute capable d'exercer cette influence pour dessiner le mécanisme de gouvernance mondial sur l'Arctique ».
La Chine, qui est d’ores et déjà observateur ad hoc du Conseil des Etats Arctiques issu de la Déclaration d’Ottawa de 1996, a demandé à en être observateur permanent.
Actuellement la Chine s'abstient d'avoir une politique arctique officielle et « a une approche prudente et non-agressive », selon Guo Peiqing, spécialiste de droit et politique polaires à l'Université de l'Océan de Chine, à Qingdao. Selon lui, « la Chine a un vrai intérêt environnemental et scientifique pour cette région qui joue un grand rôle dans le climat chinois et le changement climatique ». De plus, « si l'on veut plus de privilèges, il faut davantage de recherche. Pour jouer un rôle plus important, (la Chine) doit montrer qu'elle est spécialisée dans la recherche arctique ».
Pour les observateurs du Sirpi, si la Chine est assez respectueuse du principe de souveraineté nationale pour ne pas contester les droits territoriaux des Etats de l'Arctique, cela ne l'empêche pas de prendre ses marques, notamment sur le terrain scientifique.
Depuis 1999, Pékin n'a installé dans l'Arctique qu'une station de recherche et y a mené trois expéditions, contre 26 en Antarctique (et trois stations) depuis 1984. Cette expédition du Xuelong est donc la quatrième sur cette zone.
Le gouvernement chinois ayant décidé de consacrer davantage de moyens aux pôles dans les années à venir, entend se doter par conséquent d’un brise-glace nouveau plus petit et hautement technologique à l’horizon 2013.
Pour aller plus loin sur les questions liées à l’Arctique nous vous invitons à retrouver les débats de la dernière conférence de Défense et Environnement.
- D’une part l’intervention de Kristina Bergendal, Conseillère politique, Ambassade de Suède - Présidence du Conseil de l'Union européenne en 2009
- D’autre part les interventions de la Table ronde sur le « Perspectives du changement climatique en Arctique : conséquences environnementales, militaires et politiques, état des lieux et enjeux »
Avec :
. M. Stanislas Pottier, Conseiller auprès de l'Ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles arctique et antarctique, Ministère des affaires étrangères, Cercle Polaire
. M. Laurent Mayet, Président du Cercle Polaire Conseiller auprès de l'Ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles arctique et antarctique, Ministère des affaires étrangères, Président du Cercle Polaire
. M. Stephan Robinson, Physicien nucléaire, Directeur du programme international de désarmement de Green Cross International.
Pour aller plus loin :
- voir également les articles du blog du 02/03/2010 : « Ottawa va réglementer le trafic maritime dans l’Arctique canadien »
- voir l’intervention d'Anne Choquet, enseignante-chercheur associée à l’AMURE – UBO aux entretiens Science et Ethique 2009 « l’Heure bleue : le changement climatique et les énergies de la mer », lors de la table ronde autour de la thématique : Changement climatique : les enjeux Nord Sud, la sécurité maritime et pêche, portait sur « les glaces fondent : l’Arctique convoitée »
Article RH 3B Conseils
Source AFP / SIPRI
vendredi 16 juillet 2010
Les visées de la Chine en Arctique
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